En vous baladant le long des côtes, vous avez remarqué ces murets de pierres qui s’avancent vers le large sans savoir ce que c’est. Explications pour partir à leur découverte.
Comment fonctionnent les écluses à poissons ?
Ces longs murets de pierre sont des écluses à poissons ou des pêcheries. Situés sur le littoral oléronais, ces espaces sont destinés à pratiquer la pêche. Les écluses à poissons sont les pêcheries les plus simples. Construites dans une cuvette peu profonde, sur un fond rocheux, elles forment un fer à cheval de 400 à 1 000 m ouvert sur le large. Elles comprennent un bras nord et un bras sud constitués de pierres sèches empilées qui permettent de marquer la zone. Recueillies sur place, elles servent à monter des murs de 30 cm de hauteur jusqu’à 1,5 m ou 2 m, en partant de la plage vers le large. Fait essentiel, leur montage se réalise sans liant et tous doivent donc être horizontaux pour résister à la pression. Ils sont dotés de plusieurs ouvertures grillagées aménagées pour bloquer ou laisser l’eau s’écouler.
L’objectif est d’y piéger les poissons à la marée descendante. Les pêcheurs se déplacent alors à pied dans l’enceinte pour prendre du poisson à l’aide de leurs couteaux et de leurs espadons (longues barres de fer). Au sommet de l’arc de cercle, une vanne permet de vider l’eau.
Un peu d’histoire
Les écluses à poissons sont aussi la plus ancienne forme de pêcherie, datant de la préhistoire. En Charente-Maritime, les premières constructions se sont développées au Moyen Âge, mais son nom apparaît sur une carte à la pointe de la Chardonnière, des Trois-Pierres et de Chassiron à la fin du XVe siècle.
En 1681, Colbert promulgue sa grande ordonnance sur la marine qui règlemente la construction des « parcs de pierres ». Les murets sont fabriqués à partir de pierres rangées en forme de demi-cercle et hauts 1,20 m environ sans chaux ni ciment ni maçonnerie. Même les dimensions des ouvertures et des grilles en bois sont fixées selon la période de l’année.
À la fin du XVIIIe siècle, on compte 150 écluses autour de l’île d’Oléron, il est établi qu’elles n’entravent pas la reproduction des espèces et qu’elles protègent les rivages contre les assauts des vagues.
Au XIXe siècle, au plus fort de leur développement, on dénombre 240 écluses. Les estrans deviennent propriété du domaine public maritime et ne peuvent plus être privatisés. Les propriétaires-utilisateurs doivent obtenir une autorisation d’exploitation.
Au XXe siècle, l’interdiction de construire toute nouvelle écluse accélère encore leur déclin entamé après la Première Guerre mondiale.
Les écluses à poissons de nos jours
Depuis 1970, il ne reste que 17 écluses qui fonctionnent sous le statut de concessions des Affaires maritimes contre versement d’une redevance. L’essor de l’ostréiculture et du tourisme, ainsi que les changements du mode de vie, ont stabilisé le nombre d’écluses. Les écluses ont perdu leur fonction nourricière d’appoint et elles demandent un travail d’entretien colossal. De plus, de nombreux jeunes vivent aujourd’hui sur le continent. Les propriétaires-utilisateurs se sont mobilisés pour conserver ce patrimoine maritime au sein de l’Association Écluses à poissons et pêches traditionnelles. Créée en 1985, elle compte des bénévoles qui travaillent à maintenir cette tradition vivante et se battent pour obtenir un classement au titre des monuments historiques. Dernièrement, cinq écluses des Sables-Vigniers y ont été inscrites, une première étape qui permet de sensibiliser les élus et la population à leur cause.
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